La commission ad hoc de l’Assemblée Nationale chargée d’enquêter sur les évènements survenue à Kidal en mai 2014, pourrait demander que l’ancien Premier Ministre Moussa Mara soit traduit devant la justice. Le sujet fait l’actualité au sein de la Représentation nationale du Peuple malien.
En effet, malgré les conseils et suggestions donnés au Chef du gouvernement de l’époque par certaines chancelleries occidentales et des hauts Responsables de la MINUSMA, pour lui dissuader de se rendre dans l’Adrar des Ifoghas, l’ex-PM Moussa Mara a effectué le déplacement le 17 mai 2014. Pourtant des missions avaient été éconduites sous le Premier Ministre Oumar Tatam Ly.
Pour rappel, le vendredi 16 mai 2014, à Kidal, des femmes et des jeunes favorables au MNLA, ont manifesté à l’aéroport de cette ville. Les avions des Nations-Unies annoncés pour préparer la visite le lendemain du Premier Ministre Moussa Mara ont rebroussé chemin direction Gao. A leur bord, plusieurs Ministres maliens, dont celui de la Défense Soumeylou Boubeye Maïga. Dans la soirée, la situation est analysée avec attention à Gao. Il a été jugé que les conditions ne sont manifestement pas réunies pour une visite du Premier Ministre le lendemain.
Par ailleurs, à Bamako, dans les chancelleries occidentales et au sein du gouvernement et états-majors généraux de l’Armée, on a tenté en vain de convaincre Moussa Mara de reporter ce déplacement. Ce fut peine perdue. Donc, ce qui n’a pas empêché l’ex-Premier Ministre Moussa Mara de faire le forcing pour aller à Kidal. Malgré les mises en garde de plusieurs voix qui comptent, il a pris la destination de la cité des l’Adrar des Ifoghas dont il tenait coûte que coûte à fouler le sol en sa qualité de Chef du gouvernement malien.
Donc, malgré toutes ces mises en garde, Moussa Mara est allé à Kidal. Conséquences : la rencontre au gouvernorat entre lui et l’administration s’est terminée dans un bain de sang ; d’où, il a été contraint de quitter le gouvernorat puis Kidal sur la pointe des pieds, laissant derrière lui des dizaines de victimes !
Et, comme si cela ne suffisait pas, le Premier Ministre jetait dans la bataille les Forces armées maliennes, mal équipées, occasionnant de nombreuses pertes en vies humaines au niveau des populations civiles et des corps militaires et paramilitaires.
Non seulement l’évènement a tourné à la tragédie avec plusieurs dizaines de morts dont des Préfets et de nombreux militaires lors des affrontements des 17 et 21 mai 2014. Pis, à partir de cette date, la Région de Kidal s’est trouvée coupée du reste du Mali. Même d’autres localités relevant administrativement des Régions de Gao et Tombouctou sont tombées aux mains des rebelles à l’époque.
Un déplacement hasardeux !
«Le Premier Ministre est légitime dans son rôle, mais il a sous-estimé la réalité du terrain », affirmait un Diplomate africain en poste à l’époque à Bamako. Et ce sentiment était le même au niveau des services du Haut Représentant spécial du Chef de l’Etat à la Réconciliation que dirigeait l’actuel PM, Modibo Kéita. Selon eux, c’était à eux d’y aller en amont pour préparer sa venue.
Par ailleurs, le lundi qui a suivi les évènements, lors d’une réunion au sommet entre le Président IBK et des Représentants de la communauté internationale, le constat a été le même. «On ne badine pas avec la sécurité. Ce déplacement n’a pas été correctement préparé politiquement et militairement», commente un Diplomate qui déplore les morts.
En début d’année 2016, lors de sa tournée dans la Région de Ségou, le président IBK est revenu là-dessus. « Aucune fanfaronnade politicienne ne me fera prendre mon avion pour débarquer à Kidal et créer un incident…des tueries entre Maliens », a-t-il dit. Ce, 19 mois après cette visite calamiteuse de Moussa Mara à Kidal. Des observateurs internationaux ont analysé cette déclaration d’IBK comme un regret profond par rapport à l’entêtement de son ancien Premier Ministre Moussa Mara qu’il a remercié en janvier 2015.
La décision de l’Assemblée Nationale
Cependant, entre temps, l’Assemblée Nationale du Mali était saisie de la question. La commission d’enquêtes sur les évènements de Kidal pourrait demander que l’ancien PM Moussa Mara soit traduit devant la justice. De la synthèse des écoutes issues du Rapport de la commission, il ressort que de nombreuses personnalités ont soutenu avoir informé le PM que sa visite à Kidal n’était pas opportune à cause des vives tensions qui régnaient à l’époque sur le terrain. Les groupes rebelles avaient massé des milliers d’hommes dans la ville et ne cachaient pas leur volonté d’en découdre avec l’armée malienne. La ville abritait aussi les congrès du MNLA et du HCUA.
Oumar Diakité : LE COMBAT