jeudi 28 mars 2024
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ÉMANCIPATION FÉMININE : La loi du nombre n’est pas forcément un atout pour soigner l’image de la Femme

Quarante deux (42) femmes ont été élues députés à l’Assemblée nationale du Mali lors des législatives du 29 mars et 19 avril 2020. Les femmes récoltent ainsi les dividendes de leur combat ayant abouti à l’adoption et à l’application de la loi n°2015-052. De l’indépendance à nos jours, jamais, le Parlement malien n’avait accueilli autant de femmes.  Mais, ce nombre offre-t-il un poids réel à la gente féminine dans les débats parlementaires ? De nombreux observateurs en doutent.

 

A l’issue des législatives du 29 mars et 19 avril 2020, quarante deux femmes ont été élues députés à l’Assemblée nationale du Mali. De quoI réjouir les femmes leaders et les féministes de tout bord qui ne cesseNT de se battre pour une présence effective des femmes dans les instances de décision de notre pays.

Mais, ce nombre offre-t-il un poids réel à la gente féminine à l’hémicycle ? De nombreux observateurs en doutent. Et malheureusement, la mise en place des instances dirigeantes du parlement leur donne raison. La composition du bureau de l’AN (23 membres), des commissions générales (12) et de la Haute cour de justice et leurs suppléants (18) a démontré que « nos partis politiques étaient encore une affaire d’hommes », a analysé un sociologue. Même, si le groupe parlementaire dit « Mouvement pour le Renouveau Démocratique (MRD) est dirigé par l’honorable Aïchata A. Cissé, députée élue dans la circonscription électorale de Bourem. Une première dans l’histoire de l’Assemblée nationale depuis l’indépendance.

N’empêche que cela fait juste une seule femme sur 6 présidents de groupe parlementaire (16,66 %). Et sur dix vice-présidents, nous n’avons aussi qu’une seule femme (7è), soit 10 %. Si la proportion est équilibrée à la questure (1 femme et 1 homme), on note que 2 femmes parmi les 9 membres de la Haute Cour de Justice (22,22 %) désormais présidée par l’ancien PAN (Président de l’Assemblée nationale), honorable Issiaka Sidibé dit Isaac. Au niveau de la même institution, on a que trois femmes sur neuf suppléants (33,33 %). Au parlement, les députées se consolent avec trois postes de rapporteurs sur 12 (25 %). Mais, aucune femme n’est présidente de commission générale.

Comme quoi, le quota n’est pas une fin en soi pour réparer une discrimination. En raison de la lenteur avec laquelle le nombre de femmes augmente en
politique, les femmes le réclament de plus en plus pour améliorer leur représentation. L’introduction de quotas en faveur des femmes permet sans doute « un bond qualitatif vers une politique dont les visées et les moyens sont équitables ». Pour des analystes politiques, « c’est un moyen efficace qui permet d’envisager un accroissement substantiel de la représentation des femmes ». Le quota est un pourcentage ou un contingent (limite quantitative fixée par une autorité publique pour l’exercice d’un droit (ou la participation à une charge) déterminé imposé ou autorisé.

Le principe du quota de femmes repose sur l’idée qu’elles doivent être présentes, selon un certain pourcentage, dans les divers organes de l’État, que ce soit sur les listes de candidature, dans les assemblées parlementaires, les commissions ou le gouvernement. Ainsi, avec ce système, ce ne sont pas les femmes elles-mêmes qui ont la charge du
recrutement ou de l’élaboration des listes, mais les responsables du processus de recrutement ou les leaders politiques.

L’objectif fondamental d’un quota est de recruter des femmes aux postes politiques, de manière à assurer leur présence effective dans la vie politique. Aujourd’hui, le quota vise à assurer une présence de 30 à 40 % de femmes afin de constituer une « minorité critique » minimale. Le quota est en général appliqué en tant que mesure temporaire, c’est-à-dire jusqu’à ce que toutes les barrières empêchant l’entrée des femmes en politique soient tombées. Ce n’est donc pas une panacée.

Ce serait une grave erreur de crier victoire et de s’endormir sur les lauriers. Cela serait une grave erreur dans le cas d’espèce du Mali où les organisations féminines, dans leur quête d’émancipation, cèdent vite au mimétisme en faisant fi de l’environnement sociopolitique et culturel.

 

Œuvrons à une représentation qualitative des femmes dans nos institutions

Nous aimons copier tout ce qui se fait en Occident en oubliant que nous n’avons pas le même environnement politique et socioculturel. Ce n’est pas juste que les femmes soient sous-représentées dans nos institutions et dans des organes de décision. Mais, est-ce qu’imposer le quota est la meilleure manière de rehausser l’image de la Femme par une présence qualitative forgeant l’estime et le respect de la société ?

Dans le combat pour l’émancipation de la Femme, nous avons toujours été opposé à l’idée de quota parce que notre analyse a toujours été qu’elle ne milite pas en faveur de nos mamans, de nos épouses, sœurs, filles… Une représentation quantitative n’est pas forcément un atout de promotion ou de défense des droits si la représentativité n’est pas qualitative. Or, le quota sacrifie généralement la qualité et le mérite au profit de la quantité.

Autrement, si on ne fait pas attention, la loi n°2015-052 risque de faire des femmes de simples « meubles » décoration de nos Institutions car ouvrant la porte à une sous-représentation qualitative, compétitive. Ce qui n’est pas la finalité recherchée par la gent féminine ! Nous y voulons surtout une présence remarquable des femmes par un apport qualitatif aux débats, aux décisions à prendre… On se réjouit aujourd’hui du nombre des femmes à l’hémicycle. Est-ce que cette présence est assez positive pour l’image de la Femme ? Comme le dit si bien une nièce, « une fois là-bas tout dépend de leurs compétences ».

Mais, si les « je veux juste être Députées » sont aussi nombreuses que nous le craignons, le nombre de femmes élues à l’Assemblée nationale restera au stade de symbole pour rehausser le bilan d’un régime en termes de promotion de la Femme.

Certaines des élues se sont retrouvées dans l’arène juste parce qu’il fallait respecter la législation pour faire valider une liste. A quoi cela sert-il d’avoir une quarantaine (42 députées) d’élues si cela n’a aucun impact sur les décisions qui seront prises à l’Assemblée nationale ? A quoi le nombre sert-il si nos représentantes vont passer l’essentiel de leur temps à applaudir et à voter les lois sans chercher à savoir ce que cela apporte de concret à la Femme et à la Famille ; à la communauté ; à la société. ?

La répartition des responsabilités (présidence des commissions et des groupes parlementaires) montre malheureusement que nos Députées doivent se battre pour refuser d’être confinées dans un statut de compléments d’effectif !

Le quota offre l’avantage du nombre aux dépens généralement de la qualité, de la compétence… Des valeurs sur lesquelles doivent pourtant reposer les acquis de l’émancipation pour être inexorables ! Vive une présence massive de qualité des femmes dans nos institutions !

Moussa Bolly

Djibril Coulibaly

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