Le dernier tweet du désormais Général à la retraite Moussa Sinko Coulibaly n’est pas passé inaperçu. Bien au contraire, il a provoqué une onde de choc qui, elle-même, a mis en branle une lame de fond qui est loin de s’apaiser.
Que recherchait le Général Moussa Sinko Coulibaly en déclarant à la face du monde qu’ »Il est impérieux de mettre fin à ce régime incompétent pour abréger la souffrance du Peuple »? Lapsus calami ou intention malveillante mal contenue qui devait forcément s’échapper par la main? Pour Freud, les lapsus, qu’ils soient calami ou linguae, sont des actes manqués. Considéré sous cette lumière, le fameux tweet de l’ancien Ministre de l’Administration Territoriale n’est pas que simple jeu de mots, encore moins que paroles en l’air. Il a exprimé sans doute un souhait qu’il ne faut, toutefois, pas sortir totalement du contexte politique. On ne peut pas lui en vouloir d’émettre des critiques, d’abord en tant qu’ancien militaire sous les oripeaux civils, et qui, plus, est devenu Homme politique, voire avoir été candidat à la dernière élection présidentielle. On ne peut pas non plus le reprocher d’avoir été sensible, peut-être même exagérément que d’autres, aux déculottées infligées dernièrement à l’Armée nationale par des ennemis de tout poil. Mais lorsqu’un ancien Général insinue la fin d’un régime en suggérant qu’il est impérieux d’agir pour cela, on ne peut pas s’empêcher d’y voir un appel à coup d’État.
Là est toute la problématique de la sortie malheureuse de Moussa Sinko Coulibaly, et le contexte démocratique où est censée être gérée la vie politique nationale s’accommode mal d’une telle adresse au Peuple. C’est pourquoi d’ailleurs on comprend que la classe politique nationale, dans son ensemble, ait semblé être prise de court. L’opposition ne pouvait point applaudir le Général à la retraite, pas plus que la majorité présidentielle, au regard des morts militaires et des réactions fort énergiques de leurs familles, ne pouvait se hâter bruyamment au chevet du pouvoir en dénonçant, s’il n’est pas séditieux, l’imprudent propos. Ce qui fait que Bouba Kéïta, fils du Président IBK, a eu le dos suffisamment rond pour dénoncer le Haut Gradé devenu Politique à la faveur d’une démission anticipée de l’Armée nationale qui a aujourd’hui tant besoin de ses connaissances acquises à la prestigieuse école de saint-Cyr, en France.
Les choses devaient-elles en rester là ?
Pas si simple. Le samedi 5 octobre, depuis les lambris dorés de la République, le Chef de l’État, Ibrahim Boubacar Kéïta, rend publique une réaction à la mesure du tweet de Moussa Sinko Coulibaly. Il y dit : «Aucun putsch ne prévaudra au Mali, qu’on se le dise. Et je crois que cela n’est pas à l’ordre du jour et nous ne saurons nous inquiéter. Mais je tiens à dire combien cela est absolument ignominieux, indécent dans les temps où nous sommes». Voilà qui est suffisamment expressif et montre en quel courroux se trouve le sommet de l’État.
Sans doute, est-il impérieux de rappeler à tous les citoyens que la quiétude nationale vaut tant que les bravades sont des menaces qui provoquent souvent des situations de suspicions délétères pour la recherche des solutions politiques idoines. Tel est ce qu’il convient de ne jamais perdre de vue. Moussa Sinko Coulibaly étant, semble-t-il, un habitué des lapsus, comme preuve son propos : «Si ça ne tenait qu’à moi, il n’y aura pas de deuxième tour…», les esprits peuvent se calmer. Du moins jusqu’au prochain avatar.
Bogodana Isidore Théra