Après s’être abstenu lors du vote de la loi sur la prolongation du mandat des Députés, le parti SADI a suspendu sa participation à toutes les activités de l’Assemblée Nationale. Le Président, Dr Oumar Mariko, revient sur les conditions de ce retrait, la position des autres partis de l’opposition et le tollé suscité par la présence d’un Député SADI à l’AN après la décision.
À la surprise générale, le parti SADI a été le seul à suspendre ses activités au sein de l’Assemblée Nationale. Le parti et son Président protestent contre la prolongation du mandat des Députés qui est jugé inconstitutionnel. «C’est une décision du Bureau Politique National du parti SADI. Nous avons écrit au Président de la Commission Loi de l’AN au moment des enquêtes pour la prolongation des mandats des Députés pour lui dire que nous ne sommes pas d’accord et nous avons visé des articles de la Constitution. En tant que Président du parti, je me dois de respecter la décision du parti et, pour ça, il fallait prendre une mesure conservatoire. Ainsi, nous avons décidé de suspendre nos activités au sein de l’AN jusqu’à la tenue du prochain congrès», explique Oumar Mariko. Il se souvient qu’en 2012 le parti, sur décision de son Comité central, avait quitté l’Assemblée Nationale pour les mêmes causes. Si les deux actions se ressemblent, elles ne sont, cependant, pas les mêmes de l’avis du Président du parti. «La seule différence entre 2012 et 2018, c’est que cette fois-ci, c’est le congrès qui va décider en lieu et place du Comité Central. En ce moment, des débats sont en cours dans les structures du parti pour arriver à une position qui respecte l’éthique du parti et son orientation et qui puisse être en lien avec ce que les Maliens attendent d’un parti comme SADI», a-t-il expliqué. Si le parti se dit contre la loi de prolongation du mandat des Députés, ses élus ont surpris plus d’un en s’abstenant lors du vote de la même loi au lieu de voter non pour marquer leur désaccord. À cela, le Président a une explication : «L’abstention ne suffit rien selon les avis des juristes que nous avons consultés. Si nous avions voté contre, c’est ce qui allait être mauvais, car la loi n’avait pas lieu d’être posée devant l’AN. La Constitution n’autorise pas que les Députés siègent sur la prorogation de leur propre mandat. Notre abstention signifiait: ‘‘faites en ce que vous voulez’’. Bien avant le vote nous avions écrit au Président de la Commission loi pour dire que ce projet ne doit pas être soumis au vote des Députés, car il est illégal».
Au sein de l’opposition, le SADI est le seul parti à avoir pris cette décision. D’autres partis comme l’URD qui s’était érigé contre cette loi avant de s’abstenir comme le SADI n’ont pas, quant à eux, jugé nécessaire de suspendre leurs activités au sein de l’Assemblée Nationale. Une situation moyennement appréciée par Oumar Mariko. «Nous voulons démontrer que ce Régime est illégal. Pourquoi le Mali n’a pas pu organiser les Législatives? C’est l’incapacité du Pouvoir. Il manque de légitimité et de légalité. C’est ce que les autres partis doivent comprendre, y compris ceux qui sont dans l’opposition. S’ils ne l’ont pas compris, ils brillent par la cécité politique qui donne une légitimité à un Pouvoir qui n’en a pas. L’opposition a brillé par myopie et par cécité politiques en ne voyant pas tout ça. Mais l’opposition, il ne faut pas le voir dans la simple expression des partis politiques, il faut la voir dans les associations, les citoyens en mouvement, etc. Nous travaillons à rassembler».
Au lendemain de cette décision jugée courageuse par bon nombre de Maliens, plus d’un a été surpris de voir un Député du parti au sein de l’Assemblée Nationale, participé aux travaux en cours. Les réseaux sociaux en ont fait leurs choux gras. Mais, à en croire l’Honorable Mariko, il s’agit d’une manipulation qui ne fera pas d’effets. «La tentative, c’est de faire croire que c’est une décision d’Oumar Mariko. Or, c’est faux. En 2002, le parti est allé au Gouvernement à deux reprises, j’ai été mis en minorité. En 2011, il y a eu tentative pour que le parti aille au Gouvernement ça n’a pas marché. Cette fois, c’était la décision majoritaire. Franchement, ce n’est pas tellement mon problème, j’assume mes responsabilités de Président. Ma préoccupation ce n’est pas qu’un député aille s’asseoir à l’AN c’est plutôt d’être conforme à l’idéal du parti. Ceci étant, le congrès va trancher», a-t-il précisé davantage.
Faisant un clin d’œil à la tendance actuelle faite de transhumance et débauchage, Dr Mariko dira ceci : «Si les gens pensent pouvoir débaucher nos Députés, ils doivent comprendre que celui qui était parti en 2012 est revenu brillamment au sein du parti et sans condition. Il avait été intoxiqué pour ne pas suivre la ligne du parti ». Il en veut pour preuve l’identité que le parti qui est connu et apprécié de nombreux Maliens contrairement à d’autres. «Cette prise de position a été saluée par beaucoup de milieux. Une Dame a démissionné d’un parti dont je tairai le nom pour rejoindre nos rangs à cause de cette décision. La lutte politique c’est de travailler à clarifier sa ligne. Un parti est à la recherche des gens qui ont les mêmes points de vue pour que le cadre organisationnel soit l’expression pour magnifier les idées contradictoires, mais qui concourent au même objectif stratégique. Aujourd’hui, ils sont nombreux les Maliens qui nous disent : on ne vous avait pas compris vous aviez raison. La perte de notre indépendance aujourd’hui, nous en avions parlé, la question de la milice nous avons mis le doigt dessus, nous avons condamné ceux qui ont fait appel à des milices. Le bas sentiment chauvin de grand seigneur de grandes ethnies, nous l’avons battu en brèche en son temps et l’histoire nous a donné raison. Ce n’est pas le moment pour nous de regarder les politiciens de la petite semaine». Malgré cette décision il est bien possible de voir le SADI retourner au sein de l’Assemblée Nationale mais la condition est la suivante: «Notre décision de participer aux activités de l’AN est irrévocable jusqu’à la tenue du congrès du parti SADI. Un congrès qui peut revenir sur la décision ou la confirmer».
Mohamed Sangoulé DAGNOKO : LE COMBAT