jeudi 28 mars 2024
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GOUVERNANCE : La France, un des pays les plus corrompus au monde, invite le président IBK à « cesser la corruption et à s’occuper de son peuple »

Le président français Emmanuel Macron aurait dit au président malien IBK qu’il serait temps de « cesser toute cette corruption et de s’occuper de son peuple ». Ces propos d’un journaliste français relayés sur Facebook vont sans doute alimenter et même amplifier l’éternel débat stérile et futile sur la corruption chez nous, sans proposition concrète sur comment mettre réellement et définitivement fin à ‘toute cette corruption.
Cela est dû au fait évident que le président Macron lui-même n’a aucune idée sur comment mettre fin à toute cette corruption chez lui ou ailleurs dans le monde. S’il avait la formule magique, il l’aurait sans doute appliquée à son propre pays, la France, un des plus corrompus au monde. En effet, la France est connue dans le monde pour ses scandales politico-financiers sur fond de trafic d’influence, de délit d’initié, de fausses factures, de caisses noires, de commissions occultes (pot de vin dans le français africain), d’évasion et de fraude fiscale, de blanchiment d’argent, de scandales boursiers, et surtout pour ses policiers ripoux et toutes les formes de trafic et leur corolaire, le crime organisé qui ne peuvent prospérer que dans un environnement profondément corrompu.

C’est donc apparemment un paradoxe que le président d’un pays aussi corrompu s’affiche en donneur de leçon sur la corruption. Toutefois, avant de vous emballer dans un sens ou dans l’autre pour les propos attribués au président Macron par ce journaliste français sur les réseaux sociaux, je vous suggère de prendre du recul et de les analyser froidement. Si vous le faites, vous vous rendrez compte que ces propos appartiennent à une tradition des hommes politiques et de média français et occidentaux aussi vieille que nos indépendances, qui tend à réduire tous les problèmes de nos pays africains à la corruption.
On en est aujourd’hui au point où nos hommes d’Etat ne sont plus jugés que sur leur bilan prétendu dans la lutte contre la corruption. Cela aurait été crédible si le même critère était appliqué systématiquement aux dirigeants de tous les pays du monde. Tel n’est cependant pas le cas et pour cause : si ces critères devaient être appliqués aux dirigeants du monde, en particulier des pays occidentaux, le résultat aurait été exactement le même : un échec cuisant à éradiquer le fléau chez eux. La question logique suivante est celle-ci : pourquoi alors cette tradition de réduire tous les maux de l’Afrique à la corruption malgré le fait que le phénomène est global et non spécifique à l’Afrique ?

La réponse est qu’en réalité, cette tradition ne vise depuis toujours qu’à dissimuler aux yeux des Africains le seul vrai problème de leur continent : la quasi-absence d’activité économique réelle chez nous, conséquence directe des rapports déséquilibrés que le reste du monde a réussi à nous imposer avec la complicité d’une élite africaine complexée et allergique à tout effort intellectuel de réflexion, qui a transformé nos pays en consommateurs de leurs biens et services.

En d’autres termes, le débat stérile sur la corruption qui fait rage dans nos pays n’est qu’une diversion, un leurre visant à nous éloigner de nos vrais problèmes, une manipulation sournoise dans la guerre intellectuelle qu’on nous mène sans jamais l’admettre.
En effet, sans ce débat stérile et futile, on se rendrait rapidement compte que plus que les scandales de corruption qui secouent régulièrement la CMDT, c’est l’exportation de notre coton à l’état brut qui empêche l’émergence chez nous d’une industrie textile créatrice d’emplois et de richesses pour les candidats potentiels à l’immigration en Europe et dans le reste du monde. On se rendrait très rapidement compte que plus que les combines de nos compagnies minières étrangères visant à soustraire la majeure partie de leur production du contrôle de nos Etats, c’est l’absence totale chez nous de toutes les autres étapes de l’exploitation de nos ressources minières à part l’extraction qui explique le faible impact de cette activité sur notre économie.

On se rendrait compte que les mêmes investisseurs qui ne manquent jamais d’argument pour ne pas investir dans l’industrie chez nous ne ratent aucune occasion, s’ils ne manœuvrent pour en créer, de venir occuper tous les secteurs peu coûteux en termes d’investissement mais très lucratifs pour eux du commerce direct et des services chez nous. On se rendrait aussi compte que ce n’est économiquement pas viable ni durable de créer des infrastructures sociales comme les écoles, centres de santé, points d’eau potable dans une zone sans y créer au préalable l’économie qui assurerait le fonctionnement et l’entretien de telles infrastructures, comme nous avons si souvent tendance à le faire dans le cadre de projets pompeusement appelés de développement.

On se rendrait compte que c’est politiquement et économiquement suicidaire de placer ses avoirs sur le marché international de la spéculation boursière pour s’en remettre à d’hypothétiques investisseurs étrangers et à l’aide internationale pour son développement.
Pis, on se rendrait compte que ce débat stérile et futile sur la corruption est retourné dans l’hypocrisie la plus totale contre nous par ces mêmes hommes politiques et de media occidentaux qui trouvent toujours le moyen de les susciter et de les alimenter chez nous, pour dissuader les investisseurs de leurs pays réellement intéressés à venir investir dans notre économie de le faire.

Voilà ce que nos champions autoproclamés de la lutte contre la corruption, qui accusent tous ceux qui refusent de se laisser distraire par leur brouhaha assourdissant et étourdissant d’être corrompus, ne comprennent pas. Ces champions autoproclamés n’ont aucune idée des implications réelles de leur croisade pour leur pays dans la guerre intellectuelle qui fait rage dans le monde.

Il est plus que temps que notre classe politique et plus généralement nos élites prennent conscience que nos pays africains sont engagés dans une véritable guerre intellectuelle mondiale, et qu’elles ne peuvent plus se permettre d’ignorer ni de perdre cette guerre intellectuelle, comme elles l’ont malheureusement fait si souvent par le passé et continuent de le faire.

Laisser à d’autres le soin et le moyen de déterminer le contenu et le ton du débat politique chez nous, en d’autres termes d’en prendre le contrôle, est le moyen le plus sûr de perdre cette guerre. Sur la question de la corruption, les africains n’ont pas de leçon à recevoir du président français Emmanuel Macron.

Kandioura LE CONFIDENT

Djibril Coulibaly

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