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Droits de ses travailleurs : L’Ambassade du Canada au Mali accusée de violation

Paradoxalement, le Canada, pays renommé en matière de respect des Droits de l’Homme, à travers son Ambassade au Mali, est dénoncé de se permettre de violer les Droits de ses travailleurs locaux. Des personnels qui ont rendu des loyaux services à sa Mission diplomatique et consulaire pendant 10 à 30 ans en sont victimes. Elle (Ambassade Canada au Mali) a choisi d’observer le  mutisme  total face à la saisine qui lui a été adressée, à deux reprises, par l’Association malienne de Défense des Droits de l’Homme sur la situation. 

Pour ce faire, le Collectif de ces travailleurs licenciés  projette d’assigner l’Ambassade du Canada en justice devant les tribunaux compétents du pays. Il réclame sans succès à la représentation canadienne le paiement d’une somme de plus 73 millions de francs CFA au titre de leurs droits légaux fondamentaux.

A travers une conférence de presse, tenue hier, lundi 17 juillet 2017, à la Maison de la presse du Mali,  les anciens travailleurs à l’Unité d’Appui au Programme de Coopération Canado-malienne ont relayé l’information. Ils sont réunis dans une organisation dénommée le «Collectif des travailleurs licenciés de l’unité  d’appui à la coopération  Canado-Malienne (UAP-CCM) ». Ledit Collectif est présidé par Mme Bathily Sira Diop, avec comme porte-parole Moussa Bakayoko. Ces Responsables, accompagnés de plusieurs autres membres du Collectif, étaient face à la presse pour informer l’opinion nationale et internationale de « l’injustice » dont ils sont victimes suite à leur licenciement pour motif économique en 2016.

Les faits

En effet, pour motif économique, l’Unité d’appui à la Coopération Canado-malienne (UAP-CCM) a procédé au licenciement de ses travailleurs. Selon le Collectif de  l’UAP-CCM, ces travailleurs ont exprimé à toutes les occasions leur attachement sans équivoque à la coopération canadienne, leur disponibilité et leur volonté d’accompagner le processus de licenciement dans la quiétude et l’entente. «C’est dans ce cadre que l’UAP-CCM a commis, de commun accord avec les travailleurs, un Consultant spécialiste en Droit du Travail et de la Sécurité sociale en vue de procéder au calcul des indemnités de licenciement et primes », précise-t-il.

Suite au dépôt de son Rapport, les travailleurs ont relevé l’absence du rappel de la prime d’ancienneté dans les calculs. Car, révèle le Collectif des travailleurs licenciés, pendant toute la durée des relations de travail la prime d’ancienneté ne leur avait jamais été versée. Alors que c’est un élément essentiel du salaire  et dont le non-paiement est sanctionné par l’article L320 du Code de Travail malien en vigueur. Ainsi, le Consultant a repris les calculs en ajoutant le Rappel de la prime d’ancienneté aux indemnités de licenciement pour le déposer auprès de la Direction de l’UAP-CCM en février 2016. Aux dires des Responsables du Collectif des travailleurs licenciés de l’UAP-CCM, en juillet 2016, soit 5 mois après le dépôt du Rapport par le Consultant, l’UAP-CCM a communiqué aux travailleurs les calculs repris des indemnités avec la prise en compte de la réduction d’ITS et le Rappel de la prime d’ancienneté.

 Des incohérences !

A l’analyse de ces calculs, dénonce les licenciés, il est apparu des écarts au niveau du Rappel de la prime d’ancienneté. « L’UAP-CCM a fait en se fondant sur les salaires de base au moment de l’embauche et n’a pris en compte que les trois dernières années d’ancienneté », signale le Collectif. Pourtant, ces modalités de calcul sont contraires aux dispositions de la loi malienne qui prévoit le paiement de la prime d’ancienneté.

En effet, conformément aux dispositifs de l’article L97 du Code de Travail du Mali qui dispose : « Tout travailleur bénéficie d’une prime d’ancienneté lorsqu’il compte au moins 3 ans de présence continue dans la même entreprise… ».

Or, dans cette situation, souligne le Collectif des licenciés, 95% de plus de la vingtaine des travailleurs licenciés ont passé plusieurs années de leur carrière à l’UAP-CCM. Selon les données livrées à la presse, 80% de ces travailleurs y ont passé de 11 à 30 ans de service ; 15% d’autres y ont passé entre 4 et 10 ans de service.

Pour ce faire, le Collectif explique que  le fait de prendre comme fondement de calcul les salaires de base de l’année d’embauche est une violation de la loi et est contraire même au principe de paiement de la prime d’ancienneté.

Par ailleurs, l’évocation de la prescription du paiement de la prime d’ancienneté pour certains employés (dont les plus anciens) a été battue en brèche par la réponse fournie par l’Inspecteur du travail lorsqu’il fut saisi à cet effet. « L’inspecteur a clairement indiqué que la prescription ne saurait être évoquée ; car, le salaire des travailleurs a toujours été payé, mais avec des erreurs imputables à l’UAP-CCM. En plus, si la prescription devrait être appliquée, elle serait totale et non partielle », informe-t-il.

Un reliquat de plus 73 millions de francs CFA

A cet effet, aux dires des licenciés, après avoir reçu la réponse de l’Inspecteur du travail, la Direction de l’UAP-CCM a débloqué une enveloppe de 32 millions de francs CFA au titre du Rappel de la prime d’ancienneté contre un montant total de plus 112 millions. Cette somme, évoquent les conférenciers, fut distribuée de façon arbitraire et seulement à certains travailleurs. L’Inspection du travail, saisie de nouveau par les travailleurs, a demandé à ces derniers de percevoir ce montant comme un paiement partiel et réclamer auprès de qui de droit le reliquat qui s’élève à plus de 73 millions de  francs CFA.

Le laxisme de l’Etat malien!

C’est ainsi que le Collectif des travailleurs de l’UAP-CCM a saisi par lettre le Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale dont          ampliation a été faite au Secrétariat Général de la Présidence de la République et à l’Ambassade du Canada au Mali. Le Collectif, dans sa lettre, a tenu à faire constater au Ministre qu’«il s’agit là d’une violation flagrante des lois du Mali par un pays, le Canada qui foule au pied les droits des pauvres travailleurs qu’il aurait utilisé et épuisé pendant plusieurs décennies ».

Ce Département, à travers son Directeur Juridique, affirment les licenciés, s’est limité seulement à adresser une lettre laconique au Collectif des travailleurs dont la teneur suit : « Suite à votre lettre sus référencée relative à l’objet susvisé, j’ai l’honneur de vous informer que l’Ambassade du Canada à Bamako, saisie par nos soins, indique que tous les employés concernés par la résiliation de contrat à l’UAP-CCM ont signé le solde de tout compte au moment de leur départ en précisant ainsi avoir reçu tous les montants de leurs indemnités… ».

Malgré cette réponse, le Collectif a, de nouveau, saisi par le Ministre de Affaires Etrangères pour rappeler que la mention « pour solde de tout compte » évoquée par l’Ambassade du Canada dans les éléments de réponse que celle-ci lui a envoyés, ne pouvait être opposable aux travailleurs conformément aux dispositions des articles L110 et L111 du Code de travail en vigueur au Mali. Ici encore, déplorent les travailleurs, le Ministre s’est mué en silence jusqu’à maintenant. Ce, en dépit des nombreuses relances.

L’Association des Droits de l’Homme entre dans la danse 

Par la suite, le Collectif a saisi l’Association Malienne des Droits de l’Homme qui l’a soutenu en adressant des lettres de réclamation au Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale ainsi qu’à l’Ambassade du Canada sans succès.

De ce fait, ayant épuisé tous les recours possible de gestion à l’amiable sans succès, le Collectif déclare assigner l’Ambassade du Canada, dans les prochains jours, en justice devant les tribunaux compétents du Mali.

Abdoulaye F Coulibaly : LE COMBAT

Rédaction

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